Doctor Who : en attendant le 13

En Grande-Bretagne, c’est une institution depuis plus de cinquante ans. Un « monument », disait de lui Télérama à l’occasion de cet anniversaire célébré en grande pompe par la BBC en 2013. « Tout le monde sait qui est le Docteur« , affirmait même un expert du cinéma et de la télévision en parlant des Britanniques. Lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Londres en 2012, le bruit caractéristique du TARDIS, la machine temporelle du Docteur, a même retenti en plein medley.

En France, seuls les fans de science-fiction et de fantastique, ainsi que ceux qui s’intéressent aux séries anglo-saxones, accordent la même importance à Doctor Who. Pour tous les autres, ce n’est qu’une série étrange à laquelle ils ne comprennent pas grande chose. Un nanar feuilletonant en carton-pâte : c’est exactement la pensée qui m’a traversé l’esprit lorsque je suis tombé, par hasard, sur un épisode de la première saison de la nouvelle série diffusée sur France 4 il y a quelques années.

ERREUR. Doctor Who, sous cet aspect un peu cheap des premières saisons, est en réalité très riche, par les thèmes qui sont développés et les scénarios parfois très complexes, obligeant à se remémorer d’infimes détails des saisons passées.

Cinquante ans. Cinquante ans d’histoires sur Terre et dans l’espace, à notre époque, dans le futur ou le passé, sur Trenzalore, Gallifrey ou Skaro.
Cinquante ans, et deux séries : une première, commencée en 1963 et interrompue en 1989, dont l’objectif était au départ d’instruire les jeunes sur les périodes historiques visitées par le Docteur. Dans les années 90, une longue pause, avec juste un téléfilm en 1996. Puis le grand retour en 2005, dans une nouvelle série qui fait toujours le bonheur des téléspectateurs de la BBC aujourd’hui.
Cinquante ans, et treize acteurs pour incarner le docteur : William Hartnell (1963-1966), Patrick Troughton (1966–1969), Jon Pertwee (1970–1974), Tom Baker (1974–1981), Peter Davison (1981–1984), Colin Baker (1984–1986), Sylvester McCoy (1987–1989 et 1996), Paul McGann (1996), Christopher Eccleston (2005), David Tennant (2005–2010), Matt Smith (2010-2013), John Hurt (2013) et enfin Peter Capaldi (2013 à aujourd’hui).

Aujourd’hui, on revient sur les quatre acteurs ayant repris le rôle depuis 2005.

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Le voyageur éclair

Christopher-Eccleston-Doctor-Who-Season-1-Tardis.jpgChristopher Eccleston a pris du service en 2005. Il a la lourde tâche d’incarner le retour du Docteur sur les écrans de télévision, et semble l’avoir vécu difficilement. Il partira au bout d’une saison. L’acteur est pourtant convaincant, dans un style bien moins affirmé que ses successeurs. On peut le voir aujourd’hui dans l’excellente série de HBO The Leftovers, où il a la possibilité de bien mieux déployer son talent.

Rose (interprétée par Billie Piper), et le seule compagne de ce nouveau Docteur. Jeune, candide, elle rencontre le Docteur dans le premier épisode de la nouvelle série. Elle devient par la suite son nouveau compagnon, et apprendra à ne pas jouer avec le temps, notamment lors d’un épisode mémorable où elle voudra sauver son père, mort quand elle était bébé.

L’ambiguïté dans la relation entre le Docteur et Rose montera petit à petit dans la saison pour atteindre son paroxysme lors de l’épisode final, dans un baiser d’adieu dont l’objectif premier est de sauver la jeune femme. En effet, sans cette action du Docteur, Rose serait condamnée, après avoir absorbé les pouvoirs du Tardis et être devenue « le grand méchant loup », le mystère principal de cette première saison. Le Docteur, ayant récupéré l’énergie, est détruit, lançant une nouvelle régénération.

Diagnostic : ce Docteur manquant clairement d’entrain et de folie, nous lui conseillons de faire une cure de vitamine B et de magnésium. Mais étant donné le scénario très basique de ce retour, on comprend bien d’où peut venir la déprime. Un Docteur en demi-teinte, qu’on oublie souvent lorsqu’il s’agit de faire un top 3. Eh oui, les suivants ont bien plus marqué la série de leur empreinte…

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Vale Decem

davidtennant-kilgrave-doctor-who2.pngDavid Tennant (Harry Potter et la coupe de feu, Broadchurch, AKA Jessica Jones). Il endosse le costume pendant cinq ans, de 2005 à 2010, ce qui en fait le plus durable de la nouvelle génération. Son Docteur se révèle plus excentrique et en même temps plus profond que le précédent. Une personnalité qui se dévoile tout d’abord avec Rose, qui doit s’habituer au nouveau visage du Docteur, et finit par en tomber amoureuse (et vice versa). Une relation qui finira tragiquement : la jeune femme se retrouve propulsée dans une réalité parallèle de laquelle elle ne pourra plus jamais (ou presque) revenir.

Deux autres compagnes, Martha (Freema Agyeman) et Donna (Catherine Tate), viendront combler le vide laissé par Rose, sans jamais vraiment la remplacer. L’histoire tragique de Donna restera cependant une des fins les plus difficiles pour un compagnon du Docteur, surtout qu’elle aura été durant toute la saison 4 une compagne piquante, très touchante et drôle dans sa manière d’interagir avec le Docteur (ses retrouvailles avec le Docteur dans le premier épisode de la saison 4 sont hilarantes).

En trois saisons et cinq années d’histoires, ce dixième Docteur aura marqué profondément les fans de la série. La conclusion de son histoire s’étale sur une année entière de la fin de la saison 4 (un feu d’artifice réunissant tous les personnages de l’ère de David Tennant) à plusieurs épisodes spéciaux qui finissent en apothéose par le remplacement de Tennant par Matt Smith. Un énorme chamboulement pour la série, puisque l’acteur n’est pas le seul à changer : Russel T. Davies, le showrunner laisse sa place à Steven Moffat. Une nouvelle ère s’annonce.

Diagnostic : Allons-y. Ce Docteur reste dans une forme olympique six ans après son départ. La preuve : c’est lui qu’on est allé chercher pour fêter les cinquante ans de la série avec Matt Smith en 2013. Encore aujourd’hui, les débats sont vifs entre les aficionados de ce Docteur Tennant et ceux du Docteur Smith. Personnellement, ce Tennant serait troisième de mon top 3. Sacrilège ? Oui et non : les deux Docteurs suivants ont en effet beaucoup d’arguments en leur faveur !

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Coup de jeune

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Quand Matt Smith débarque dans la série, certains hurlent au jeunisme. Physiquement parlant, le contraste avec les précédents est évident. Ce Docteur a l’air trentenaire au mieux. Pas plus. Et avec lui, c’est un gros coup de jeune que connaît la série. Steven Moffat, nouveau patron, développe toute une nouvelle mythologie autour du Docteur et de son passé, qui s’étalera sur les trois saisons de Matt Smith. Mort du Docteur, son nom, sa femme, etc : tous ses mystères vont créer un lien et un fil rouge passionnant à suivre.

À nouvelle ère, nouveaux compagnons. La première, c’est Amélia Pond (Karen Gillan). C’est la première personne que rencontre ce nouveau Docteur, « the first face this face have seen« . Une relation très tendre, de l’ordre du lien fraternel, se développe entre eux, rarement perturbée par le fiancé d’Amy, Rory (Arthur Darvill). Celui-ci finira au fil des épisodes par accompagner le Docteur dans tous ses voyages.

Autre personnage important dans cette ère : River Song (Alex Kingston). Sa particularité : elle et le Docteur se rencontrent dans le désordre. Donc leur première rencontre pour lui était leur dernière pour elle. Une histoire assez tragique, surtout que des sentiments amoureux vont rapidement naître entre les deux personnages.

Quand le chemin d’Amy et Rory se séparera de celui du Docteur, il aura un peu de mal à se décider à reprendre un compagnon, jusqu’à ce qu’il rencontre Clara Oswald (Jenna Coleman). Elle sera à ses côtés jusqu’à ce qu’il arrive au bout de son histoire, qui se conclue par une miraculeuse régénération…

Diagnostic : Mon Docteur préféré. L’interprétation tout en joie de vivre et en excentricité de Matt Smith apporte un second souffle au personnage, indispensable après le passage de David Tennant. Au final, ce Docteur aura un nombre d’adeptes similaire à son prédécesseur. Un tour de force quand on en sait la popularité. Pari réussi, mais défi encore plus grand pour celui qui prendra sa place en 2013. Géronimo !

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Un homme bien ?

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Peter Capaldi est le dernier Docteur en date. Si les commentateurs avaient trouvé Matt Smith un peu jeune, ici, c’est l’inverse qui se produit. L’acteur ne serait-il pas trop vieux ? Réponse : on s’en fout. Encore une fois, le choix s’avère judicieux. L’acteur apporte une ambiguïté au personnage : est-il un homme si bon que ça, ce Docteur ?

Pour la première fois, le personnage prend les traits d’un acteur qui a déjà joué dans la série. En effet, Peter Capaldi interprétait dans la quatrième saison un habitant de Pompéi que le Docteur sauvera, avec sa famille, de l’éruption du Vésuve. Une entorse à son code de conduite qui lui revient en mémoire à la faveur de ce nouveau visage. Pour lui, ce phénomène s’est produit pour lui faire comprendre que parfois, intervenir dans le destin des personnes qu’il rencontre n’est pas interdit.

Sur les deux saisons de ce nouveau Docteur, la neuvième est indéniablement la meilleure. Dans une logique d’épisodes doubles, les histoires prennent plus d’ampleur, avec l’introduction de personnages très intéressant comme Missy ou Ashildr/Me (Maisie Williams, l’effrontée Arya Stark de Game of Thrones).

Clara continue de l’accompagner durant ces deux saisons, mais sera remplacée dans la dixième saison par une nouvelle compagne, Bill. Pour de nouvelles aventures toujours aussi palpitantes ? Verdict en mars prochain.

Diagnostic : Pour moi, un très bon Docteur. Il se hisse à la deuxième place de mon top 3 personnel. J’adore la maturité et l’ironie qu’apporte Peter Capaldi au personnage. Pourtant ce n’était pas gagné, surtout en passant après Matt Smith. Cet acteur donne une dimension tragique au Docteur, quelque chose qu’on peut voir particulièrement bien dans le onzième épisode de la saison neuf. Un chef d’oeuvre.

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Thomas Evrard

Suspens sur le 13

Peter Capaldi sera toujours le Docteur dans la dixième saison. Mais après ? Trois saisons semble être la bonne durée avant de tirer sa révérence. Qui pourrait prendre la suite et devenir ainsi le treizième Docteur ? À Geekobs, on a quelques envies…

  1. Maggie Smith : et si le Docteur prenait enfin les traits d’une femme ? Les règles de la régénération le permette. Il serait peut-être temps que ça arrive. Les candidates seraient nombreuses. Beaucoup voient bien Helena Bonham Carter dans le rôle. Il est vrai. Pour ma part, je ferais un choix un peu plus audacieux : Maggie Smith. Cette grande dame du cinéma et de la télévision britannique donnerait au personnage quelque chose de piquant, avec une maturité conférée par l’âge. Seul problème : l’actrice aurait bien du mal à assumer les nombreuses séquences d’action qu’implique un rôle comme celui du Docteur. C’est bien dommage…
  2. Idris Elba : là encore, le changement serait intéressant. Pas seulement parce que le Docteur a toujours été désespéremment blanc, mais aussi parce que cet acteur dispose d’une autorité naturelle qu’il serait assez surprenant de voir dans ce personnage, d’ordinaire plus subtil. Un choix là encore audacieux mais qui permettrait de donner, comme avec Capaldi, un nouveau souffle à la série.
  3. Matt Smith : une rumeur laissait entendre il y a quelques mois que le onzième Docteur serait partant pour reprendre du service. Une hypothèse qui me plait particulièrement. Car en effet, ce retour d’un ancien visage permettrait de développer une intrigue pleine de mystère, et de développer un peu plus la psychologie du personnage, confronté à une situation totalement inédite. L’idée est séduisante mais peut-être compliquée à mettre en place…

Quoi qu’il en soit, le treizième approche, et avec lui, son lot de mystères et de nouvelles intrigues. En attendant, le règne du douzième continue, et ce dès le mois de décembre dans le traditionnel épisode de noël.

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